L’action en concurrence déloyale est ouverte à toutes les parties même si elles ne
sont pas titulaires d’une clientèle.
Le parasitisme* peut être invoqué aussi bien par une entreprise à l’encontre de
son concurrent, que par une entreprise à l’encontre d’un autre opérateur économique
n’entretenant pas, à son encontre, de rapport de concurrence.
Les actions en concurrence déloyale visent le plus souvent à obtenir réparation
au travers de dommages-intérêts. Leur montant peut être très variable et résulte de
l’appréciation souveraine des juges du fond.
La simple réparation du préjudice, si celui-ci est établi, pourrait se révéler
inefficace ou insuffisante dans certaines situations. Le juge peut imposer des mesures
d’interdiction, voire sous astreinte, pour faire cesser les actions jugées de concurrence
déloyale ou de parasitisme.
Des mesures de publication de la décision pourront également être demandées.
L’évaluation du préjudice subi est très délicate. En effet, il s’avère difficile d’estimer
les dégâts causés par rapport à des critères qui peuvent facilement être trompeurs.
Ainsi par exemple, à côté d’une perte caractérisée, le préjudice peut aussi consister
en un manque à gagner qui peut être difficile à retracer, voire à modéliser.
Devant ces difficultés, il est nécessaire d’envisager, d’un point de vue analytique,
les différents éléments et composantes des préjudices qui peuvent être présentés
pour donner les outils chiffrés nécessaires au juge du fond pour son appréciation du
préjudice.
1. Quels sont les éléments principaux de réparation du préjudice à présenter ?
Selon la doctrine usuelle en matière de détermination du préjudice, la recherche
doit être faite selon les deux branches bien connues : les pertes subies (damnum
emergens) et le gain manqué (lucrum cessans).
Mais au-delà de ces éléments et outre la qualification de la faute, il convient d’obtenir
une analyse économique globale de la situation de la victime et de l’auteur des actes
déloyaux. Il faudra examiner les caractéristiques du secteur, du positionnement de
la victime, de sa stratégie d’innovation, de la nature de son activité, de la nature
des produits attaqués par l’acte de concurrence déloyale et de l’importance des
investissements.
Les éléments ci-après permettent de donner des points de repère :
A- Gain manqué (Lucrum cessans)
• Détournement de clientèle ;
• Baisse d’activité : baisse des ventes, baisse des commandes ou lettres
d’annulation ;
• Baisse du chiffre d’affaires, perte de marge sur coûts variables ;
• Impossibilité d’accès au crédit ;
• Evolution du compte d’exploitation, du compte client sur plusieurs années,
avant et après les actes de concurrence déloyale ;
• Non-accès à des marchés (études de marchés).
B- Pertes subies (Damnum Emergens)
• Perte de la marge commerciale : ajustement des prix ;
• Non-ventes de plusieurs modèles ;
• Perte de part de marché ou éviction totale du marché, perte de contrats :
comparaison du chiffre d’affaires avant et après les actes déloyaux ;
• Perte des bénéfices afférents à un contrat du fait de sa rupture injustifiée ou
de la perte de chance de le conclure ;
• Perte de commissions dues à l’utilisation d’un fichier client ;
• Perte de substance du patrimoine du demandeur, dépréciation d’un élément
incorporel attractif de la clientèle, dépréciation d’un signe par :
* atteinte à l’image de marque du fait de la vulgarisation du produit,
* avilissement de la marque,
* atteinte à la réputation commerciale (publicité dénigrante, perte
d’image) ;
• Dépenses engagées pour corriger les effets néfastes des faits dommageables ;
• Perte de valeur de l’entreprise victime ;
• Perte de chance.
C- Désorganisation durable de l’entreprise
• Coûts d’embauche du nouveau personnel pour compenser les effets d’une
politique de débauchage menée à son encontre et coûts de formation de ce
nouveau personnel ;
• Perte d’un avantage concurrentiel : banalisation et vulgarisation d’un produit
en l’absence de tout droit privatif ;
• Divulgation de savoir-faire ;
• Appropriation d’un fichier de clientèle : reprise des mêmes arguments de
vente en citant en référence des clients du demandeur.
D- Diminution ou perte d’un avantage concurrentiel
• Faisceau de faits de parasitisme démontrant la volonté délibérée du défendeur
de se placer dans le sillage du demandeur ;
• Usurpation d’une valeur économique qui rend vains les investissements
effectués : atteinte aux investissements ;
• Gêne dans les initiatives commerciales et perte d’une chance de
développement économique ;
• Frais de recherche, de création ou d’acquisition d’un modèle ;
• Etudes de marketing.
E- Préjudice moral
2. Quels documents fournir au juge au soutien de la demande de réparation ?
A- Documents comptables et financiers
• Statistiques certifiées conformes des ventes par produit avec graphiques
d’évolution ;
• Comparaison du chiffre d’affaires réalisé avec un chiffre d’affaires prospectif ;
• Factures d’achats indiquant le prix pratiqué chez l’auteur des actes de
concurrence déloyale ;
• Coûts de recrutement du personnel ;
• Attestations d’experts comptables ou de commissaires aux comptes ;
• Budgets de promotion et de publicité certifiés conformes, frais de marketing
et de promotion ;
• Documents prévisionnels de gestion et rapports de gestion ;
• Rapports des commissaires aux comptes.
B- Documents commerciaux, marketing et publicitaires
• Coûts du lancement de produit avec les dépenses marketing et publicité
certifiées conformes par le commissaire aux comptes ;
• Coupures de presse datées pour établir la notoriété de la marque ou du
modèle et preuve des investissements réalisés ;
• Supports publicitaires, publication de catalogues, campagnes de presse,
salons professionnels ;
• Sondages d’opinion auprès de la clientèle du demandeur ;
• Analyses de marché et de l’évolution des parts de marché entre la victime ou
ses concurrents ;
• Etudes de marché, de notoriété, de ressemblance ou d’opinion.
C- Expertises
• Expertises amiables faites des cabinets spécialisés en évaluation des
préjudices ;